Marché du Conseil : bilan 2021 et perspectives

Pour ce premier article de l’année, nous vous proposons quelques éléments de réflexion sur l’évolution du Conseil en revenant en particulier sur trois points : les tendances de marché, les défis liés au Capital Humain et enfin un focus particulier sur la Data.

Tendance de marché : une performance 2021 meilleure qu’anticipée et des prévisions 2022 encourageantes

Pour la deuxième année consécutive nous publions une synthèse des prévisions pour le marché du conseil. L’année dernière (revoir notre article sur les prévisions 2021), les prévisions étaient marquées par une forte incertitude sur le niveau de reprise après une année 2020 en fort retrait. 2021 aura finalement un bon cru, avec une reprise plus forte qu’anticipée :

Syntec Numérique : après un marché en recul de -5% en 2020, on prévoyait +1% en 2021. Le marché a finalement progressé +6% en 2021, avec des éditeurs de logiciels à +9%, les ESN à +4% et un conseil en technologie qui s’en sort particulièrement bien à +6% (contre -3% prévus à l’origine). Numeum, qui regroupe les acteurs du Syntec Numérique et de l’Afdel (Association Française des éditeurs de Logiciels et Solutions Internet), prévoit une croissance de l’ordre de 7% en 2022, pour un marché total de 60 milliards d’euros. Voir le détail ici

Syntec Conseil : après un marché en recul de -7% en 2020, on prévoyait +9% en 2021. Nous avions alors souligné le côté « volontariste » de la prévision. Et bien le marché a finalement progressé de +10% en 2021 et le président de Syntec Conseil anticipe une croissance « à deux chiffres » en 2022 et un doublement du marché sur les 10 prochaines années (soit une croissance moyenne annuelle de 7% sur la période). Cette bonne dynamique générale ne semble cependant pas profiter aux petits cabinets (moins de 3 m€ de CA) dont l’activité aurait reculé de -7% en 2021 selon le Président du Syntec Conseil. Voir son interview ici

Les acteurs du Conseil confrontés aux défis du Capital Humain

Si les clients semblent au rendez-vous, les acteurs du Conseil pourraient bien être bridés dans leurs opérations et leur développement côté ressources. On aura en effet rarement vu autant de facteurs transformatifs se télescoper. Pêle-mêle citons :

La pression salariale et les difficultés de recrutement

Sur fond d’inflation à 3% et de Grande Démission à la française, les cabinets vont devoir gérer au plus près leurs effectifs. Côté recrutement les choses s’annoncent compliquées. Chez les juniors, comme le souligne justement Matthieu Courtecuisse, président du Syntec Conseil et fondateur de Sia Partners, l’ensemble du conseil capte déjà 20 % des promos des écoles d’ingénieurs et 30 % de commerce. Difficile de faire plus, et il faudra plus probablement s’attendre à moins dans les années qui viennent. Chez les consultants plus expérimentés, les chasseurs n’arrivent pas à suivre et la concurrence entre les cabinets est exacerbée.

L’avènement du travail hybride et le rééquilibrage Paris / Région

69% des salariés du conseil en management sont actuellement basés en Ile de France et 27% en région lyonnaise, cette concentration survivrait-elle au travail hybride ? Des villes comme Nantes, Bordeaux, Lille ou Marseille pourraient tirer leur épingle du jeu. Les cabinets avancent encore en ordre dispersé sur la question, mais il n’y aura sans doute pas de retour en arrière. Avec des questions potentiellement explosives à la clé : un collaborateur qui déménage à Bordeaux doit-il conserver son salaire parisien ? De nombreux cabinets en profitent en tout cas pour ouvrir des bureaux en région.

La montée en puissance des collectifs d’indépendants

On a certes depuis longtemps promis aux acteurs traditionnels du Conseil une révolution qui se fait attendre, celle des plateformes de consultants indépendants. Force est de constater que leur activité reste modeste au regard du marché global. Seules les ESN ont pour l’instant été réellement challengées par ces acteurs, et encore.

Mais des signaux faibles montrent que la nature de l’offre indépendante pourrait évoluer rapidement. Si la barrière a toujours été forte entre les consultants indépendants intervenant seuls d’un côté et les cabinets traditionnels pouvant mettre à disposition des équipes de l’autre, l’essor des collectifs d’indépendants pourrait changer la donne. On peut d’ailleurs noter la belle levée de Collective.work (levée de 7 m€ pour une équipe de 10 personnes), plateforme de collectifs d’indépendants, même si son activité reste pour l’instant centrée à 85% sur le digital et l’IT – à l’image des autres acteurs du freelancing comme Malt. Dans le domaine IT, c’était aussi la logique à l’œuvre dans le rachat d’Inop’s par Freelance.com en 2020.

Finalement la crise sanitaire, en accélérant la digitalisation du travail et en ouvrant de manière brutale la question de sa localisation, a bouleversé l’organisation des travailleurs du savoir et a des conséquences importantes sur la manière dont les acteurs du Conseil vont devoir gérer leur Capital Humain dans les prochaines années.

Les Data, au cœur de la transformation du marché

La thématique Data intéresse de près le monde du Conseil, c’est d’ailleurs ce qu’a pu nous confirmer une journaliste qui contribue régulièrement au portail Consultor : les articles traitant de la Data obtiennent toujours de très bonnes audiences. Les professionnels du Conseil s’interrogent ainsi régulièrement sur la meilleure manière d’intégrer les Data et les métiers de la Data dans leur offre. Mais honnêtement ces réflexions ne nous semblent pas à la hauteur de l’enjeu. Pour l’anecdote, la dernière étude publiée par la commission data du Syntec Conseil se conclut en ces termes « Est-ce que la data a de la valeur ? Tout le monde est convaincu que oui. […] La data est indubitablement un métier d’avenir, riche de nouvelles perspectives et donc de nouveaux métiers ! » Tremblez GAFAM…

En réalité la prise de conscience des acteurs du conseil est bien trop timorée par rapport aux enjeux. Pour s’en convaincre, on peut citer au minimum trois constats :

Le marché de la Data est deux fois plus gros que celui du Conseil en Management

En Europe (UE + UK), le marché des Data & Information Services (qui regroupe tous les produits et services élaborés à partir de données brutes) représente 75 milliards d’euros contre 35 milliards pour le conseil en management.

Aux Etats Unis, ce marché est même 2,6 fois plus gros (185 milliards d’euros) que celui du conseil en management (70 milliards d’euros) alors que ce dernier passe lui-même pour y être particulièrement développé par rapport au reste du globe.

Sources : Statista et the European data market monitoring tool

Si l’on voulait être un brin provocateur, on pourrait répondre aux acteurs du conseil en management qui se demandent comment ils pourraient intégrer la Data dans leur offre de service que la réalité du marché voudrait plutôt que les acteurs de la Data se demandent comment intégrer le conseil en management dans la leur.

La Data est devenue un ingrédient incontournable de la création de valeur

Au même titre que le capital humain ou la marque, les data sont devenus un actif incontournable pour les entreprises. Une étude McKinsey a montré que ces actifs « intangibles » captent désormais plus de 40% des investissements réalisés aux Etats-Unis et en Europe (voir l’article). Les actifs immatériels représentent même 90% de la valorisation du S&P 500 d’après une autre étude d’Oceantomo, société spécialisée dans l’évaluation de la propriété intellectuelle, qui a mis en évidence une montée en puissance de la valorisation des actifs immatériels par rapport aux actifs matériels sur ces trente dernières années. (lien vers l’article)

Les acteurs du conseil ont un problème d’attractivité sur les métiers de la Data

Nous vous renvoyons à l’excellent article publié par Consultor en octobre dernier : le conseil en strat’, voie royale ou voie de garage pour les data scientists ? (lien vers l’article)

Les chiffres sont édifiants : il y aurait une centaine de data scientists travaillant pour les cabinets de conseil en stratégie en France, dont une soixantaine au BCG et une trentaine chez McKinsey. Pour poursuivre sur l’exemple de McKinsey, même si des divisions spécialisées comme McKinsey Solutions ou McKinsey Analytics représenteraient jusqu’à la moitié des effectifs du cabinet aux Etats-Unis (avec une bonne partie dédiée à la Data), ces entités emploient principalement des profils opérationnels, et pas forcément les leaders ou les têtes pensantes qui font avancer l’état de l’art. Il va pourtant bien falloir intégrer ce type de compétence, peut-être en choisissant de former de très bons profils « strat » à la data plutôt qu’en essayant de faire venir des data scientists bien plus tentés par les GAFAM ou des start-up.

En guise de réflexion, Consulting Hacks participe d’ailleurs au lancement d’un nouveau service GAS4.io dédié à la valorisation des données externes (en notamment open source) pour le compte de cabinets de conseil et d’entreprises. Nous aurons l’occasion d’en reparler prochainement dans un opus spécial Data.

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